Ce terme de marathon, passé dans le langage courant et désignant une épreuve officielle de course à pied d’une longueur de 42,195 kilomètres, nous vient de la Grèce Antique et désigne une plaine (et une ville) située à environ 40 kilomètres d’Athènes. Le nom de cette épreuve mythique provient de l’Antiquité, en -490 av JC durant la première guerre Médique, et commémore la course de Philippidès, un hémérodrome (messager intercité de la Grèce Antique) entre la plaine de Marathon et Athènes pour annoncer la victoire des Athéniens sur les Perses. La légende voudrait que Philippidès mourut d’épuisement à l’arrivée après avoir déclamé son message : « Nenikekamen ! » (« nous sommes victorieux »).
Selon Hérodote, historien grec, l’histoire serait différente. Lors de l’invasion de la plaine de Marathon par les Perses, les Athéniens auraient dépêché Philippidès à Sparte pour demander de l’aide. Dans cette quête désespérée, Il aurait alors couvert, en courant, une distance d’environ 250 kilomètres entre Athènes et Sparte en moins de 36 heures. Toutefois, cet exploit, aurait été vain puisque, sans nouvelles de Sparte et de leur messager, les Athéniens auraient finalement donné l’assaut aux Perses dans la plaine de Marathon et en sont sortis victorieux. La légende voudrait, par ailleurs, que Pan, Dieu protecteur des bergers et des troupeaux, mi-homme, mi-bouc, lui soit apparu sur le mont Parthénion, lors de cette course, pour lui demander pourquoi les Athéniens ne lui vouait aucun culte malgré sa protection. A son arrivée Philippidès aurait fait part de cette apparition aux Athéniens qui ont alors érigé, près de l’Acropole, un sanctuaire de Pan dans lequel ils procédèrent ensuite à des rites cultuels.
Il existe donc aussi une épreuve moderne dantesque commémorant cet exploit : le Spartathlon reliant annuellement Sparte à Athènes en plein été avec barrières horaires pour le moins sélectives et un temps de course imparti de 36 heures maximum pour franchir la ligne d’arrivée. http://www.spartathlon.gr/en/
Selon Plutarque, philosophe grec, ce ne serait pas Philippidès que Miltiade, commandant en chef des Athéniens, aurait missionné pour annoncer la victoire à Athènes mais un certain Euclès, qui, lui aussi, serait mort d’épuisement à son arrivée après avoir délivré son message.
Lucien de Samosate (province romaine de Syrie), quelques siècles plus tard, ayant vraisemblablement confondu les deux théories, serait donc à l’origine de la version retenue par l’Histoire selon laquelle Philippidès aurait parcouru la distance de Marathon à Athènes pour délivrer dans un dernier souffle le message de victoire. A ce titre, une statue a été érigée en l’honneur de Philippidès à Marathon.
Carte de la Grèce antique
Une autre hypothèse très improbable voudrait que Philippidès soit déjà allé d’Athènes à Sparte pour quérir de l’aide, puis soit retourné à Marathon afin de livrer bataille pour enfin revenir à Athènes annoncer la victoire….. soit un périple de presque 600 kilomètres avec une bataille sanglante avant les 40 derniers kilomètres. Peut-être une épreuve ultime à envisager….sans la bataille!! Quoiqu’il en fût réellement, c’est pour célébrer cette dernière course que le baron Pierre De Coubertin, d’après une idée de son ami Michel Bréal, inclut une épreuve de 40 kilomètres nommée « Marathon » jusqu’au stade olympique d’Athènes lors des premières olympiades modernes en 1896. Ce premier marathon fut alors gagné par un berger grec, Spyridon Louis, en 2 heures 58 minutes et 50 secondes.
Spyridon Louis
Plus tard, d’autres Marathons furent organisés de par le monde sans toutefois que la distance exacte de l’épreuve ne soit précisée et variant aux alentours de 40 kilomètres. Lors des jeux olympiques de Londres en 1908, la distance du point de départ au château de Windsor à la tribune royale dans le « White City Stadium » était de 41,600 kilomètres, mais à la demande de la reine Alexandra, le départ fut reculé sur le bord du terrain de tennis sur herbe afin que la famille royale pût avoir une meilleure vue. La distance totale fût alors de 42,195 kilomètres, laquelle fût acceptée internationalement comme définitive en 1924.
Le marathon, épreuve de légende, autrefois considéré comme réservé à une élite sportive, voit aujourd’hui le rang de ses adeptes gonfler d’années en années. Cet engouement pour cette discipline sportive est né aux Etats-Unis dans les années 1970 et s’est progressivement étendu au monde entier dans les années 1980. De nos jours des milliers de Marathon se courent sur le globe chaque année et des dizaines de milliers de coureurs, néophytes ou avertis, en prennent le départ, chacun ayant sa propre motivation.
Bien que couvrant tous la même distance depuis 1924, certains Marathons bénéficient d’une renommée particulière, notamment en raison de leurs parcours « roulant », propices à l’établissement de nouveaux records. Ainsi les Marathon de New-York, Berlin, Boston, Londres, Chicago ou Tokyo sont souvent le théâtre d’exploits chronométriques. Et si les champions viennent y battre des records, le commun des mortels, lui, s’y rend pour optimiser ses chances d’y atteindre son objectif ou pour l’épingler à son « tableau de chasse ». Aux yeux de tous, le marathon de New-York, reste le plus prestigieux notamment et surtout grâce à l’aura dont jouit la ville dans l’imaginaire collectif.
Depuis l’avènement de cette discipline sportive, les records n’ont cessé d’évoluer. Tout d’abord chez les hommes dès le début du siècle. Ainsi entre 1908 et 1909, en seulement deux années, le record du monde masculin a gagné pas moins de 15 minutes alors que depuis le premier passage en dessous des 2h10mn en 1967 et 2015 (soit 48 ans), ce même record n’a évolué que d’à peine 7 minutes. Entre 1913 et 1965, malgré dix années d’interruption des compétitions consécutives aux deux guerres mondiales, le record du monde est tombé à 2h12mn soit près de 30 minutes gagnées en 40 ans de compétition. La progression est encore plus fulgurante chez les femmes dont le premier record homologué date de 1964. En 60 ans, le record féminin est tombé de 3h27mn et 45s à 2h14mn et 04s, toutefois l’écart entre les records masculins et féminins s’est considérablement amoindri.
Evolution du record du monde masculin du Marathon
Temps | Athlète | Pays | Lieu | Date | Vitesse moyenne |
---|---|---|---|---|---|
2 h 58 min 50 s (40km) | Spyrídon Loúis | Grèce | Athènes, Grèce | 10/04/1896 | 13,42 km/h |
2 h 55 min 18 s | Johnny Hayes | États-Unis | Shepherd's Bush, Angleterre | 24/07/1908 | 14,44 km/h |
2 h 52 min 45 s | Robert Fowler | États-Unis | Yonkers, États-Unis | 01/01/1909 | 14,65 km/h |
2 h 46 min 52 s | James Clark | États-Unis | New York, États-Unis | 12/02/1909 | 15,17 km/h |
2 h 46 min 04 s | Albert Raines | États-Unis | New York, États-Unis | 08/05/1909 | 15,24 km/h |
2 h 42 min 30 s | Frederick Barrett | Royaume-Uni | Polytechnic Marathon, Angleterre | 08/05/1909 | 15,57 km/h |
2 h 40 min 35 s | Thure Johansson | Suède | Stockholm, Suède | 31/08/1909 | 15,77 km/h |
2 h 38 min 16 s | Harry Green | Royaume-Uni | Polytechnic Marathon, Angleterre | 12/05/1913 | 15,99 km/h |
2 h 36 min 06 s | Alexis Ahlgren | Suède | Polytechnic Marathon, Angleterre | 31/05/1913 | 16,21 km/h |
2 h 32 min 35 s | Hannes Kolehmainen | Finlande | Anvers, Belgique | 20/08/1920 | 16,59 km/h |
2 h 29 min 01 s | Albert Michelsen | États-Unis | Port Chester, États-Unis | 13/10/1925 | 16,99 km/h |
2 h 27 min 49 s | Fusashige Suzuki | Japon | Tokyo, Japon | 31/03/1935 | 17,12 km/h |
2 h 26 min 44 s | Yasuo Ikenaka | Japon | Tokyo, Japon | 03/04/1935 | 17,25 km/h |
2 h 26 min 42 s | Son Ki-Chong | Corée du Sud | Tokyo, Japon | 03/11/1945 | 17,25 km/h |
2 h 25 min 39 s | Suh Yun-bok | Corée du Sud | Boston, États-Unis | 19/04/1947 | 17,38 km/h |
2 h 20 min 43 s | James Peters | Royaume-Uni | Polytechnic Marathon, Angleterre | 14/06/1952 | 17,99 km/h |
2 h 18 min 41 s | James Peters | Royaume-Uni | Polytechnic Marathon, Angleterre | 13/07/1953 | 18,25 km/h |
2 h 18 min 35 s | James Peters | Royaume-Uni | Turku, Finlande | 04/10/1953 | 18,26 km/h |
2 h 17 min 40 s | James Peters | Royaume-Uni | Polytechnic Marathon, Angleterre | 26/07/1954 | 18,39 km/h |
2 h 15 min 17 s | Sergey Popov | Union soviétique | Stockholm, Suède | 24/08/1958 | 18,71 km/h |
2 h 15 min 17 s | Abebe Bikila | Éthiopie | Rome, Italie | 10/09/1960 | 18,71 km/h |
2 h 15 min 16 s | Toru Terasawa | Japon | Beppu, Japon | 17/02/1963 | 18,71 km/h |
2 h 14 min 28 s | Leonard Edelen | États-Unis | Polytechnic Marathon, Angleterre | 15/07/1963 | 18,82 km/h |
2 h 13 min 55 s | Basil Heatley | Royaume-Uni | Polytechnic Marathon, Angleterre | 13/07/1964 | 18,90 km/h |
2 h 12 min 12 s | Abebe Bikila | Éthiopie | Tokyo, Japon | 21/10/1964 | 19,15 km/h |
2 h 12 min 00 s | Morio Shigematsu | Japon | Polytechnic Marathon, Angleterre | 12/06/1965 | 19,17 km/h |
2 h 09 min 37 s | Derek Clayton | Australie | Fukuoka, Japon | 03/12/1967 | 19,53 km/h |
2 h 08 min 34 s | Derek Clayton | Australie | Anvers, Belgique | 03/05/1969 | 19,69 km/h |
2 h 08 min 18 s | Robert De Castella | Australie | Fukuoka, Japon | 06/12/1981 | 19,73 km/h |
2 h 08 min 05 s | Steve Jones | Royaume-Uni | Chicago, États-Unis | 21/10/1984 | 19,76 km/h |
2 h 07 min 12 s | Carlos Lopes | Portugal | Rotterdam, Pays-Bas | 20/04/1985 | 19,90 km/h |
2 h 06 min 50 s | Belayneh Dinsamo | Éthiopie | Rotterdam, Pays-Bas | 17/04/1988 | 19,96 km/h |
2 h 06 min 05 s | Ronaldo da Costa | Brésil | Berlin, Allemagne | 20/09/1998 | 20,08 km/h |
2 h 05 min 42 s | Khalid Khannouchi | Maroc | Chicago, États-Unis | 24/10/1999 | 20,14 km/h |
2 h 05 min 38 s | Khalid Khannouchi | États-Unis | Londres, Angleterre | 14/04/2002 | 20,15 km/h |
2 h 04 min 55 s | Paul Tergat | Kenya | Berlin, Allemagne | 28/09/2003 | 20,26 km/h |
2 h 04 min 26 s | Haile Gebreselassie | Éthiopie | Berlin, Allemagne | 30/09/2007 | 20,34 km/h |
2 h 03 min 59 s | Haile Gebreselassie | Éthiopie | Berlin, Allemagne | 28/09/2008 | 20,42 km/h |
2 h 03 min 38 s | Patrick Makau | Kenya | Berlin, Allemagne | 25/09/2011 | 20,47 km/h |
2 h 03 min 23 s | Wilson Kipsang | Kenya | Berlin, Allemagne | 28/09/2013 | 20,52 km/h |
2 h 02 min 57 s | Dennis Kimetto | Kenya | Berlin, Allemagne | 28/09/2014 | 20,57 km/h |
2h 01 min 39 s | Eliud Kipchoge | kenya | Berlin, Allemagne | 18/09/2018 | 20.80 km/h |
Evolution du record du monde féminin du Marathon
Temps | Athlète | Pays | Lieu | Date | Vitesse moyenne |
---|---|---|---|---|---|
3 h 27 min 45 s | Dale Greig | Royaume-Uni | Ryde, Angleterre | 23/05/1964 | 12,17 km/h |
3 h 19 min 33 s | Mildred Sampson | Nouvelle-Zélande | Auckland, Nouvelle-Zélande | 21/07/1964 | 12,68 km/h |
3 h 15 min 22 s | Maureen Wilton | Canada | Toronto, Canada | 06/05/1967 | 12,95 km/h |
3 h 07 min 26 s | Anni Pede-Erdkamp | Allemagne de l'Est | Waidneil, Allemagne | 16/09/1967 | 13,5 km/h |
3 h 02 min 53 s | Caroline Walker | États-Unis | États-Unis | 28/02/1970 | 13,84 km/h |
3 h 01 min 42 s | Elizabeth Bonner | États-Unis | Philadelphie, États-Unis | 09/05/1971 | 13,93 km/h |
2 h 55 min 22 s | Elizabeth Bonner | États-Unis | New York, États-Unis | 19/09/1971 | 14,43 km/h |
2 h 49 min 40 s | Cheryl Bridges | États-Unis | Culver City, États-Unis | 05/12/1971 | 14,92 km/h |
2 h 46 min 36 s | Michiko Gorman | États-Unis | Culver City, États-Unis | 02/12/1973 | 15,19 km/h |
2 h 46 min 24 s | Chantal Langlacé | France | Neuf-Brisach, France | 27/10/1974 | 15,21 km/h |
2 h 43 min 54 s | Jacqueline Hansen | États-Unis | Culver City, États-Unis | 01/12/1974 | 15,44 km/h |
2 h 42 min 24 s | Liane Winter | Allemagne de l'Est | Boston, États-Unis | 21/04/1975 | 15,58 km/h |
2 h 40 min 15 s | Christa Vahlensieck | Allemagne de l'Ouest | Dülmen, Allemagne | 03/05/1975 | 15,79 km/h |
2 h 38 min 19 s | Jacqueline Hansen | États-Unis | Eugene, États-Unis | 12/10/1975 | 15,99 km/h |
2 h 35 min 15 s | Chantal Langlacé | France | Oiartzun, Espagne | 01/05/1977 | 16,30 km/h |
2 h 34 min 47 s | Christa Vahlensieck | Allemagne de l'Ouest | Berlin, Allemagne | 10/09/1977 | 16,35 km/h |
2 h 32 min 29 s | Grete Waitz | Norvège | New York, États-Unis | 22/10/1978 | 16,60 km/h |
2 h 27 min 32 s | Grete Waitz | Norvège | New York, États-Unis | 21/10/1979 | 17,16 km/h |
2 h 25 min 41 s | Grete Waitz | Norvège | New York, États-Unis | 26/10/1980 | 17,37 km/h |
2 h 25 min 28 s | Grete Waitz | Norvège | Londres, Angleterre | 17/04/1983 | 17,40 km/h |
2 h 22 min 43 s | Joan Benoit | États-Unis | Boston, États-Unis | 18/04/1983 | 17,74 km/h |
2 h 21 min 06 s | Ingrid Kristiansen | Norvège | Londres, Angleterre | 21/04/1985 | 17,94 km/h |
2 h 20 min 47 s | Tegla Loroupe | Kenya | Rotterdam, Pays Bas | 19/04/1998 | 17,98 km/h |
2 h 20 min 43 s | Tegla Loroupe | Kenya | Berlin, Allemagne | 26/09/1999 | 17,99 km/h |
2 h 19 min 46 s | Naoko Takahashi | Japon | Berlin, Allemagne | 30/09/2001 | 18,11 km/h |
2 h 18 min 47 s | Catherine Ndereba | Kenya | Chicago, États-Unis | 07/10/2001 | 18,24 km/h |
2 h 17 min 18 s | Paula Radcliffe | Royaume-Uni | Chicago, États-Unis | 13/10/2002 | 18,43 km/h |
2 h 15 min 25 s | Paula Radcliffe | Royaume-Uni | Londres, Angleterre | 13/04/2003 | 18,69 km/h |
2 h 14 min 4 s | Brigid Kosgei | Kenya | Chicago, Etats-Unis | 13/10/2019 | 18,88 km/h |
Force est de constater que le record mondial du Marathon tend vers sa limite tout comme dans la plupart des autres sports. Les progrès considérables en matière de physiologie et médecine du sport, de diététique*, de nutrition, de techniques d’entraînement ainsi que les avancées technologiques dans le domaine de l’équipement sportif ont permis, de concert, cette progression fulgurante faisant gagner près d’une heure au meilleur marathonien en 1 siècle. A défaut d’autres découvertes majeures dans ces domaines, le facteur limitant reste les capacités physiques de l’être humain. Un athlète sera-t-il capable de passer sous la barre, pourtant toute proche, des 2 heures avant la fin du XXIème siècle? Rien n’est moins sûr!
* Jusqu’au milieu du XXème siècle, la consommation d’apports énergétiques et l’hydratation, pendant l’épreuve, étaient considérés comme néfaste à la performance. Les coureurs ne buvaient pas d’eau et encore moins de solutions énergétiques. Ainsi, le Français Alain Mimoun a remporté le Marathon olympique de Melbourne en 1956 sous une chaleur écrasante sans avaler une traitre goutte d’eau. Pire, une rasade de cognac ou autre liqueur, en guise de stimulant, avant ou pendant les épreuves faisait partie des pratiques courantes. La légende voudrait qu’Emile Zatopek, alias « la locomotive humaine », le célèbre coureur tchécoslovaque au style unique et au masque de souffrance permanent, buvait de la bière pendant les compétitions.
Les centaines de milliers de participants, chaque année, d’une épreuve de Marathon pourraient, pour la plupart, eux aussi, s’écrier comme Philippidès : « Nenikekamen! » ; victorieux qu’ils sont d’avoir remporté l’épreuve ou la médaille olympique, d’avoir peut-être battu le record du monde, plus modestement d’avoir atteint leur objectif chronométrique ou encore, dans la grande majorité des cas, d’avoir simplement terminé leur premier Marathon démystifiant ainsi cette curieuse distance de 42,195 kilomètres qui leur semblait encore inaccessible, quelques plus heures plus tôt.
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